A la pêche aux pépites ft Hénoch - Aron

ft Patron et Aron

A la pêche aux pépites

La tête rentrée dans les épaules, Trizt pose son regard vairon sur le chef. Encapuchonné sous son haut sombre, une simple mèche rousse dépasse sur son front.

-Mais puisque je vous dis que j'ai pas fait exprès de tuer l'autre forgeronne..., marmonne Trizt.

Alors oui, certes, y'en a pas beaucoup, des forgerons en ville. Pendant plus d'une dizaine d'années Trizt allait voir la même, jusqu'à ce que celle-ci essaye de le dégommer, et c'est Trizt qui a gagné.

-Je suis pas calibré pour la diplomatie moi, c'est tout. sifflote le vampire entre ses dents.

Il en fait des tonnes sur cette histoire, comme s'il était vexé comme un poux. Il ne l'est pas. Il s'en cogne de la bonne femme. Il se doute qu'il ne pourra pas leurrer son chef longtemps. Mais de là à vendre Cassian Merkelová comme étant un maudit ? Il n'en est pas au stade de vendre sa vieille famille, même Trizt a des limites dans ses tueries. Il suit un code. Le respect de sa famille y est inscrit.

Sauf Doru.

Mais QUI respecte Doru, franchement ?

-Salut ! lâche Trizt en rentrant dans la forge.

Son nouveau meilleur copain - fournisseur par tout temps de billes de frondes en tout genre, il a nommé... Le forgeron.

Parce que oui, ile ne se rappelle pas son nom.

Le forgeron ne lui en avait pas donné.
Depuis l'apocalypse, il avait dû réviser tous ses standars et accepter des clients qu'il n'aurait jamais approvisionné sinon.

Son regard s'attarda sur les bouts de peau trop pâles, un frisson atavique lui parcourant l'échine à la simple pensée de ce que sa famille penserait de leur présence ici.

- Salut, répondit-il d'une voix bourrue en posant son marteau à plat sur sa chère enclume. Qu'est-ce que je peux faire pour vous, messieurs ?

Il reporta son poids sur sa jambe valide pour soulager la convalescente. Contre toute attente, il n'avait pas succombé à sa fièvre et était même suffisamment retapé désormais pour assurer sa part du boulot.

Un miracle.

Mon vieux pote Iron

Hénoch soupira. Tritz avait certainement beaucoup de chance, et de talent, pour être encore en vie. Les vampires comme lui étaient toujours les plus faciles à traquer. D'une certaine manière, il avait du respect pour lui. Les dentus les plus "salissants" avaient beaucoup de paramètres en leur défaveur, si bien qu'ils étaient parfois (souvent) plus puissants que des vampires plus agés mais plus sage. Devoir échapper aux chasseurs n'étaient pas une mince affaire et si Tritz n'était pas bien vieux, Hénoch était certain qu'il avait vu plus de combat que certains de ses confrères millénaires.

« Que tu ais fait exprès ou non ne change pas grand chose. Mais tant que ça ne te retombe pas dessus. »

De toute façon, un mort de plus ou de moins dans une guilde d'assassin... Il ricana, appuyant plus encore sur la visible irritation du vampire. Même s'il l'appréciait, l'originel n'allait pas se gêner pour se moquer de lui, comme il le faisait avec tous les autres.

« Je suis surpris que tu connaisses ce mot, pour être honnête avec toi.»

Ils entrèrent enfin dans la forge, alors que l'intense chaleur leur frappait le visage. Le vieux vampire se déconnecta de ses ombres, dirigeant toute son attention sur les alentours. S'il y avait quelque chose de crucial, ses petits espions avaient les moyens d'attirer son attention, de toute façon. Tritz salua l'homme, et Hénoch fit de même d'un hochement de tête. C'était apparemment un humain travailleur, qui avait la carrure qui allait avec sa profession.

« Nous avons besoin, en tout cas moi, d'une lame de fer. Pas d'acier ou quoique ce soit. Du fer. Pur. pas forcement quelque chose de long ou ostentatoire. Quelque chose de fonctionnel. Un peu comme ça.»

Il tira de l'interieur de sa veste une dague d'une quinzaine de centimètre, avec une garde minuscule et une poignée simple de bois.

« Et oui, je sais ce qu'une lame de fer implique, mais c'est important que ce soit dans ce matériau précis.»

ft Patron et Aron

A la pêche aux pépites

Il écoute son chef distraitement passer sa commande, donner les détails, être précis comme il l'est d'habitude. Pendant ce temps là, il furette dans la forge, regardant un peu tout ce qui lui semble curieusement agréable à découvrir ou à regarder. Un enfant de 5 ans dans une boutique de bonbons ne ferait pas mieux.

-Ooooooh mais c'est génial ça ! Moi aussi j'en veux un ! dit Trizt en pointant du doigt un marteau recourbé de façon particulière.

Cela doit être si facile de tuer avec !

Alors qu'il pointe du doigt l'objet avec la cruelle envie d'en posséder un, le dit objet se déplace rapidement dans sa main. Son regard choqué et sa moue de quelqu'un qui vient de faire une bêtise le fait se tendre.

-Oups...

Ce n'était pas sensé faire cela. N'est-il pas le genre de personne à projeter les choses plutôt qu'à les attirer ? OH BON SANG ! SON POUVOIR EST CASSÉ !

-Je vous pose ça là, mes excuses ~

Comme si c'était un oeuf qu'il risquait de casser, il dépose l'outil doucement sur une surface plane à laquelle il ne fait pas attention.

-De mon côté des billes de fronde, comme d'habitude. Ah, en fer pur aussi, hein ? Si possible. Enfin comme d'habitude.

Qu'est-ce qu'il vient de se passer, là, au juste ?

Du fer.

- Vous avez de la chance, on a été livré ce matin, dit-il en sortant son carnet de commande de sa poche.

Il hésita, papota les pages maculées de suif et griffonna quelques annotations. Il se méfiait des sens surnaturels de ses clients et n'avait pas envie qu'ils rencontrent son tabouret à grandes dents, de crainte qu'ils ne découvrent et ébruitent qu'il y avait un truc bizarre chez les forgerons.

- Les billes et la dague, dans deux jours. Mais on a une pénurie de bois. Une garde simple en cuir de champignon ? Ce sera cher, je vous préviens. On ne peut plus faire les mêmes tarifs avec la flambée des prix des matières premières...

Conditions non négociables. Il voulait bien aider à la reconstruction de sa ville en taillant dans les prix des clous et des outils, mais il devait impacter cette décision sur les denrées non essentielles, comme les armes et autres babioles de confort. Il griffonna le prix et le leur tendit, inflation de 50% sur le prix des munitions de Tritz.

Mon vieux pote Iron

Il afficha un air particulièrement contrarié. Ils ne pouvaient pas attendre deux jours. Certainement pas.

« A vrai dire, il est vital que ce soit fait en urgence. Je me fiche du prix, ni même de l'aspect final. Le cuir de champignon ira très bien. Mais il me le faut maintenant. Pareil pour ses billes, j'imagine que c'est un moule, de toute façon, vous pouvez bien en couler quelques unes sans trop d'effort.»

Hénoch n'était pas un abruti non plus, et il avait vu plus d'un forgeron au travail en quelques millénaires d'existence.

« Outre l'argent, je peux fournir du bois comme monnaie d'échange ou faire parvenir de la nourriture également.»

Enfin, il allait en demander un peu à son fils, qui pourrait bien lui sauver une courge ou deux.

« Et puis, j'ai également un petit tuyau qui devrait faire marcher votre petite forge à plein régime, si vous me promettez de vous y mettre tout de suite. »

Le forgeron ne l'avait tout bonnement pas entendue, la rumeur. Sinon, il serait déjà en train de faire des lames de fer.

« Et évite de toucher à tout, Tritz, s'il te plait.»

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A la pêche aux pépites

Oui oh, ça va hein ! Il n'a pas fait exprès ! C'est ce que semble dire son regard tandis qu'il regarde son patron avec une moue toujours aussi ennuyée. Il glisse ses mains dans ses poches, là, cela devrait lui couper l'envie d'aller farfouiller, ou d'amener à lui des objets sans le vouloir. RAH ! N'y penses pas Trizt ! Pense à autre chose comme...

Il a une belle veine dans le cou, ce forgeron.

Miam miam.

Qu'est-ce que...?

Est-ce que ce nouveau pouvoir lui ouvrirait l'appétit ? Ah non hein ! Déjà qu'il est un gangrel, si en plus on change ses habitudes, ça va pas aller du tout ça ! Il ne veut pas retourner à la cave pendant plusieurs semaines pour être contrôlé ! Nope.

CECI EST UN NOPE.

- Je ne recommencerai pas. répond Trizt en cherchant l'apaisement intérieur.

Sage, là, chhhuuuuut.

Si Nath était là, il lui fourrerait une poche dans la main, et le couverait de son aura...

Rien que d'y penser, les muscles de ses mâchoires se détendent.

- J'ai cru comprendre que certains quartiers étaient touchés plus durement par le rationnement. Ce serait de quoi troquer, ou maintenir une bonne qualité de vie pour vous.

- C'est du fer dont on a besoin, répondit le forgeron, laconique, en jetant un coup d'oeil à son client.

Au rouquin, s'entend. Il le suivit des yeux encore un bref instant, comme pour s'assurer qu'il ne s'amusait plus à lui mater le cou - non, il était tout sauf discret. Une fois rassuré, il reporta son attention sur le vampire qui devait être son supérieur ou son sire.

- Si vous les voulez maintenant, ce sera plus cher. La reconstruction de la ville a la priorité.

Sous entendu ? Il n'avait pas besoin de son tuyau pour faire tourner ses forges à plein régimes. Un constat bourru, sans animosité. Alors qu'il aurait sans doute dû. Il désigna d'un geste le creuset où le fer en fusion attendait d'être versé dans des moules :

- Je devais honorer une grosse commande de clous et de têtes de marteaux. Je peux vous faire passer avant, si l'argent n'est vraiment pas un problème.

Mon vieux pote Iron

Voilà qui était un peu plus raisonnable. Heureusement que l'assassinat payait plutôt bien.

« Ce serait parfait. Et si c'est la matière première qui manque, j'ai une autre proposition..»

Il reprit le premier couteau qu'il avait déposé, et en sorti deux autres, un avec une lame plus large et longue, et un qui ressemblait au premier, mais avec un genre de résine à la place du bois.. Il posa aussi la bourse qu'il avait apporté. C'était une somme coquette pour le travail demandé, sans être démesurée mais qui prenait compte de la flambée actuelle des prix.

« Ce sont les deux lames dont je me sers le moins. C'est de l'acier qui date encore de l'époque des forges industrielles. Cela devrait compenser le fer utilisé. A vous de voir si vous préférez les refondre ou les vendre. Ou troquer, comme le fait bien remarquer Tritz.»

C'était un sacrifice nécessaire. Il s'attachait peu à son matériel. C'était avant tout des outils. Tant que la qualité était suffisante..

« Le fait est que l'apocalypse, ou en tout cas ce qui y ressemblait pas mal, a apporté son lot de nouveauté. En tout cas, c'est la rumeur qui court. Une nouvelle variété de non-humain serait dans la nature, et pas une aussi sympathique que d'autres. Le fer serait leur faiblesse, c'est pour ça que nous sommes là. La reconstruction de la ville est importante, je le sais bien, sinon je n'aiderai pas moi-même à faire repartir la production de nourriture. Mais si elle est mise en péril par une nouvelle espèce dangereuse, cela sera réduit à néant.»

Peut-être qu'il s'alarmait pour rien. Mais l'Originel préférait, depuis longtemps, de prévenir que guérir.

« Attendez-vous à recevoir d'autres demandes de ce genre, une fois la rumeur bien ancrée dans les esprits.»

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A la pêche aux pépites

La mâchoire lui en tombe. Quoi ? Comme ça ! Il vient présenter le but de ses recherches ? Sans préambule ? Sans tâtouiller le terrain ? SANS MÊME VÉRIFIER QUE CA EN EST PAS UN ?! Ah il est fort, le chef. C'est pour ça que c'est lui, le chef.

- Oui, oui, comme mon chef dit. dit Trizt en hochant la tête plusieurs fois.

- Réfléchissez bien. A quoi bon retaper la ville si à côté, y'a des gars qui viennent tout détruire ? Pour votre commerce, c'est sûr que ça sera profitable, mais vous risquez de pas voir de la variété dans vos commandes avant longtemps. Et les matières premières vont manquer. Le plus tôt on s'assure que c'est sous contrôle, le plus tôt vous pourrez retourner à votre train train.

Et tout le monde y gagne. N'est-ce pas ?

Les mâchoires du forgeron jouèrent discrètement, alors qu'il essayait de se concentrer sur les dagues et la bourse et non les paroles des deux vampires. Hélas, c'était trop tard. La simple idée que des créatures de la nuit, celles là même que leurs familles chassaient depuis des générations, veillent s'en prendre à son tabouret lui retournait les entrailles.

Des centaines de remarques acerbes lui traversèrent l'esprit, sa petite voix lui dit de se la boucler et de faire comme si de rien n'était, mais son coeur, lui, ne pouvait pas la fermer après s'être tut pendant si longtemps.

- ça m'étonne que les vôtres cherchent à buter des gens au lieu de les aider.

Si les vampires avaient eu la décence de s'entretuer, ils n'en seraient pas là.

- Faites pas comme nos ancêtres, grogna-t-il. On vient à peine de sortir de la merde et de récupérer du vent et de la pluie, manquerait plus qu'on rebousille tout en refaisant les mêmes conneries.

Il grommela un truc à base d'essayer de faire pénitence pour ses péchés au lieu de buter son prochain, pour changer, et secoua la tête avant de faire quelques pas dans sa forge pour réfléchir. Maintenant qu'il connaissait le but de ces armes, il n'était plus certain de vouloir honorer cette commande...

Mon vieux pote Iron

Hénoch ouvrit d'abord de grand yeux, c'était pour le moins inattendu. Il resta incrédule, le temps d'une demi-seconde, hésitant entre l'evisceration immédiate ou l'hilarité la plus totale. Il fallait croire qu'il avait besoin d'une bonne blague, car son rire, toujours moqueur, retentit dans la forge.

« Aaaaahahahh, les humains sont si naïfs. L'art de la mort est leur apanage depuis des millénaires mais ils trouvent encore le moyen de penser que ce sont les autres qui cherchent à reprendre la destruction. Si notre petite ville tient encore debout, c'est en majeure partie grâce aux non-humains. S'ils décidaient tous d'arrêter d'aider comme ils le font, elle s'effondrerait dans l'anarchie et les émeutes. Alors épargnez-moi ce genre de tirade, c'est de la pure et simple ignorance.»

Depuis tout temps, c'était eux, les humains, la source du problème. Parce qu'ils étaient, pour la plupart, faibles et peureux. Même la guerre et la destruction qu'ils avaient engendrés n'avaient pas suffit à leur mettre du plomb dans l'aile et ils continuaient de causer des soucis pour des histoires futiles ou cupide. L'originel reprit doucement son calme, et passa à l'action. C'est à dire que lui-même, ne fit rien. Les ombres les plus lointaines et couteuse à maintenir s'évaporèrent, elles n'avaient de toute façon rien apprise. Elles réapparurent sous ses pieds, se faufilant dans la forge. Hénoch comptait repartir avec du fer, payé, ou non. Ses ombres se glissèrent dans les recoins, furetant hors de vue. S'il n'obtenait pas ce qu'il voulait, alors il faucherait le métal sous n'importe quelle forme. A vrai dire, des clous, c'était une bonne idée.

« Vos ancêtres, et je le sais parce que j'y étais, ont tenté de se débarrasser des autres non-humains à coup de bombe nucléaire. Comme je n'en ai pas dans les poches, et que je demande un couteau, je pense, très sincèrement, qu'on est plutôt tranquille de ce côté-là.»

Les mêmes conneries. Elle était vraiment bonne celle-là aussi. Bon, il était vrai que Tritz était venu là dans l'idée d'en chasser un. Hénoch n'était pas encore certain de la marche à suivre. L'extermination n'avait jamais été une idée très judicieuse, et si les nouveaux maudits étaient capables de se tenir à carreau et vivre de la même manière que les dentus, pourquoi pas, hein ?

« Toujours est-il que si une de ces nouvelles créatures se transforme au milieu d'une foule et commence à équarrir la population, tout le monde sera bien content que quelques individus se soient préparés à cette éventualité. Nous ne sommes évidemment pas les seuls à faire cela. Tritz l'a bien souligné, s'il ne reste personne pour clouer des planches, à quoi bon forger des clous. »

Il se retint de rire en entendant parler de pénitence. C'était se bercer d'illusion. D'autant plus quand on était un vampire. Creatorem leur avait enlevé quelque chose, et avait fini par le leur rendre, à condition qu'ils aient vécu leur vie comme s'ils avaient gardé ce quelque chose. C'était injuste. Creatorem l'avait toujours été. Plus tôt on l'acceptait, plus tôt on se débarrassait de ses idées idiotes. Mais ce n'était pas le sujet et ignora les paroles du forgeron, continuant sur les ombres.

« Moi, je les aime déjà. Ne serait-ce que parce que c'est encore une bêtise sans nom de Creatorem et qu'entre maudit, on se comprend. J'aimerais cependant être en mesure de sauver ma peau si l'un d'entre eux ne m'appréciait pas à la même valeur.»

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A la pêche aux pépites

- Rooooh tout de suite les grands mots. pestouille Trizt doucement, ses lèvres traçant un croissant de lune carmin à tendance carnivore.

Trizt voudrait juste vérifier s'ils sont comestibles. Il se porte volontaire pour planter une ou deux canines dedans... Sachant qu'il peut aller jusqu'à quatre, ce n'est pas trop demander ! Si ? Allez... une petite goutte !

- Chef, chef, m'abîmez pas mon forgeron, j'en ai besoin, y'en a plus beaucoup...

La faute à qui ?

C'est un autre débat. Et tandis qu'il patpat mentalement la pensée rebelle :

- Allez, faut se serrer les coudes, hein ? On est les plus à mêmes de les comprendre, on fait partie de l'équipe des gens qui boulotent d'autre gens. Si on a moyen de moyenner pour que ça parte pas en carnage et en chasse au monstre... Ah tiens, vous nous feriez pas des chaines, ou des menottes, tant qu'on y est ? D'un beau fer bien polis et brillant.

Au moins tout ça.

Hallelujah !

Le forgeron désigna Tritz des deux mains à la « VOILA, lui, il a tout compris », sans lâcher Hénoch du regard.

- Il a tout dit.

C'était exactement ce qu'il avait voulu dire : les vampires étaient justement les mieux à même de les aider, alors pourquoi recommencer comme leurs ancêtres à tous en essayant de buter les monstres qui faisaient peur au lieu d'opter pour d'autres solutions ?

- Bolas, chaines, menottes, je veux bien. Y'a eu assez d'horreurs de commises, grommela-t-il, bourru. J'ai pas envie d'avoir ça sur la conscience en plus de tout le reste… Vous avez réussi à apprivoiser vos bêtes, vous pouvez faire en sorte que ça se passe mieux pour tout le monde cette fois…

Il écarta les bras, l'air… d'un homme fatigué, blessé, prêt à aider, mais pas au prix des morceaux restant de sa conscience. Un homme qui ne captait pas exactement ce qu'avait voulu dire son client avec son « n'abimez pas mon forgeron » puisque le brun n'avait pas bougé d'un cil et... et ça commençait à le travailler un peu.

Mon vieux pote Iron

L'Originel leva les yeux au ciel. Au moins, il était plus enclin à faire quelque chose pour eux. Pas d'arme pour autant. C'était fâcheux. Hénoch aimait les lames et il n'allait certainement pas s'excuser d'en vouloir une. Déjà, parce qu'être maudit n'empêcherait personne d'être sur la liste des Serpents d'argent et ensuite parce qu'avant de menotter qui que ce soit il faut déjà être en mesure de se défendre correctement. Les bolas étaient une arme de chasse pour attraper quelque chose qui fuit, pas quelque chose qui vous saute à la gorge. Alors ses petites ombres prendrait ce dont il avait besoin.

« Si vous le dites.»

Toujours est-il que la compassion non voilée du forgeron était des plus étranges. Ce n'était pas un humain normal, c'était certain. Soit il cachait quelque chose, soit il était définitivement blasé et n'avait même plus besoin d'avoir peur de quoi que ce soit. Les Hommes étaient prompts à la destruction, d'autant plus quand il y avait de potentiel danger.

« Ce sera bien la première fois qu'un humain se soucie de ce genre de chose. En quelques millénaires d'existence, il était temps.»

ft Patron et Aron

A la pêche aux pépites

Trizt n'y voit pas de problème.

- Allez, chef, on prend ça ? Les tous les trucs que le monsieur a dit. Ce sont des nouveaux joue... articles de travail. Ca ne peut que nous être utile !

Et au pire, ça pourra être refondu pour faire autre chose. Faudrait juste trouver un autre forgeron et le menacer assez fort ! Non ?

- Bon, m'sieur l'forgeron, par contre il nous faudrait ça assez vite, quoi. Parce que ça commence à mal se passer en ville, plus tôt on comprend de quoi il en retourne, plus vite ça se passera mieux pour ces bestioles, et le reste du monde.

Leur bouffe, quoi. Parce qu'il faut dire ce qui est, il semblerait que ces maudites choses bouffent au même râtelier qu'eux.

Un grognement sourd.

- Je suis pas mes ancêtres, merci. Creatorem a été très clair, là. Moi ça me donne pas envie qu'Il nous renvoie ses horreurs. J'dis pas que dans trois jours, j'aurais pas changé d'avis et oublié qu'Il nous surveille, mais…

Il haussa les épaules. Et grommela dans sa barbe un truc à base que si ça se trouve, avant d'être lui, il était un manticore ou un dhampire, pour ce qu'il en savait.

Les petites ombres n'allaient pas trouver grand-chose d'intéressant en fer-fer : quelques vieux clous rouillés, une poignée, au mieux. Après un petit effort de mémoire, Hénoch se souviendrait que le forgeron l'avait prévenu qu'il s'apprêtait à couler son stock... et que le fer utilisable était présentement en fusion dans l'énorme creuset. Les autres objets aisément identifiables étant quelques-uns des outils du forgeron pour le moment posés sur l'enclume en fonte, dont le fer était trop coupé pour être d'un quelconque intérêt.

Il pointa Tritz du doigt :

- J'ai entendu. Et je suis pas d'accord. Les chasseurs ont eu besoin d'argent contre vous parce que vous êtes supérieurs en tout aux humains. Est-ce que vous avez essayé d'en combattre une, de ces choses, pour dire que votre existence est en danger, ou même pas ?

Il secoua la tête, et commença à sortir les moules des billes bien connues du gangrel.

- Combien de billes et vous prenez quoi, en définitive ?

Mon vieux pote Iron

Ses ombres ne trouvèrent pas grand chose. Mais lui comme elles étaient des êtres patients. S'il devait voler une partie des clous en devenir, il attendrait. S'il devait attendre la nuit pour le faire, qu'à cela ne tienne.

« Creatorem n'a jamais été réellement clair sur quoi que ce soit et il est plus changeant qu'une girouette. Les vampires en sont la preuve vivante.»

Le forgeron l'irritait. Il vivait depuis moins d'un siècle et se pensait aussi sage qu'un être millénaire. Ah, ses humains. Néanmoins, et c'était peut-être ce qui l'enervait le plus, c'est qu'il pensait correctement. L'originel s'evertuait à apprendre à ses infants, à ses frères, aux infants de ses frères et aux infants de ses infants à arrêter de vouloir étriper tout et n'importe quoi à la moindre contrariété. Si un être aussi fragile qu'un humain était capable de le comprendre, pourquoi ses imbéciles de descendant n'en était pas capable. Fort heureusement, le forgeron n'était pas que sage. C'était aussi un idiot. Le premier humain qui a voulu attaquer un lion pour la première fois et sans arme avait du passer un sale quart d'heure. Il n'était pas du genre à faire ce genre d'erreur.

« Le principe, avant de se frotter à un ennemi dont, justement, on ne sait rien, c'est d'y aller préparer. S'ils sont plus faible que nous, et bien, la lame n'aurait pas d'utilité. Dans le cas contraire, je serai bien content de l'avoir plutôt que de me faire étriper. C'est un principe de base. Il faut être fou ou inconscient pour penser le contraire. Tritz, prends ce que tu veux, je me débrouillerai autrement. Fer ou pas.»

Si c'était une faiblesse, comme l'argent pour eux, ses bonnes vieilles lames pourraient les éventrer comme n'importe qui. Le fer est un bonus. Que Tritz prenne ce dont il avait besoin.

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A la pêche aux pépites

L'instant shopping semble réveiller l'instinct dépensier de Trizt. La perspective de s'alléger de néo€ pour gagner des objets qui vont agrandir sa collection fait briller ses yeux.

- Chef, chef, c'est pas ça qu'on appelait faire sa liste au père Noël ? Quelle idée de con de croire qu'un barbu sur son traineau tenu par des rennes... attends, tu crois pas que les humains auraient confondu les bois des bestioles avec les ailes des anges ? En vrai, si le père Noël c'est Lui, ça prend un tout autre sens.

Ce n'est définitivement pas noël, parce que c'est payant.

- Alors, je voudrais ça, et ça, et ça, et puis ça, et puis tout ce que vous avez dit tout à l'heure.

Définitivement. Trizt a hâte de se mesurer à mains nues avec ces bestioles et de repeindre les murs avec leurs sangs. Il faudra juste espérer que celles-ci soient agressives, et lui donnent un motif de lâcher la violence tapie en lui.

- Et puis, j'ai un copain qui bosse dans les serres, qui aurait besoin d'un bon couteau. Vous savez ? C'est pour célébrer qu'il ait survécu à l'apocalypse, tout ça. C'est un humour entre nous. Justement, je me disais qu'un outil en fer lui serait bien utile, parce que ça dure bien dans le temps, il pourra le refiler à son fils, m'voyez ? Je sais être sentimental quand il faut.

Le forgeron se gratta la tête et mit de côté les moules demandés, non sans jeter de fréquents regards en direction du creuset, l'air de calculer la quantité nécessaire.

- Si vous voulez du durable, je vous déconseille le fer. C'est de la merde.

Jugement sans appel.

- ça perd vite son tranchant, et maintenant avec le changement de temps, ça recommence à rouiller, grommela le forgeron. Vaut mieux prendre de l'acier. Durable et fiable.

Il rejoignit le second vampire et lui rendit les armes posées précédemment en guise de paiement. Il ne toucha pas à la bourse, qui risquait de partir intégralement dans la commande de Tritz. Il se passa une main dans les cheveux, visiblement embarrassé par la tournure de leur discussion :

- C'est que j'ai réussi à chasser une, de ces choses, avec une barre de fer toute con, alors que je suis juste moi. Donc j'ai du mal à imaginer un vieux vampire comme vous avoir besoin d'autre chose qu'éternuer pour les mettre KO.

Il désigna Tritz d'un pouce jeté par dessus son épaule :

- Lui, j'dis pas, ça se voit que c'est encore un bleu, mais vous... Enfin, je peux vous recommander à des collègues qui accepteront de faire le boulot. Désolé.

Mon vieux pote Iron

Il ricana en entendant parler du Père Noël. Les vieilles légendes survivaient, chez les humains. Surtout celle-ci qui avait toujours été festive et pleine de joie, même dans les pires situations. Certes, l'idée même du vieux barbu en rouge était absurde, mais c'était souvent ce qu'il fallait pour survivre ici bas. La vie n'était pas, elle-même, une absurdité ?

« Aussi loin que je m'en souvienne, cela a toujours été une légende humaine. Mais peut-être prend-t-elle racine chez les anges, oui. Ne te charge pas trop non plus, s'il nous faut nous deplacer dans la ville toute la journée tu finiras par le regretter..»

Hénoch se rapprocha du comptoir, déjà plus intéressé par les paroles du forgeron que par les envies de jardinage de Tritz. Sa tentative, noble certes, de flouer l'artisan n'avait pas fait mouche..

« Une de ces choses vous dites ? A quoi ressemblait-elle ? Vous a-t-elle blessé ? J'ignore encore tout de cette nouvelle espèce, j'aimerai vraiment que vous m'en disiez plus.»

S'il avait semblé ennuyé par les restrictions imposés par l'homme, ce n'était plus le cas. Les armes n'importaient deja plus, maintenant. Ils étaient en présence de quelqu'un qui fut aux premières loges, et cela n'avait, vraiment, pas de prix. Il retint la petite remarque, un peu acerbe, sur le choix du mot "chasser" qu'il employa. Après le laius sur la paix dans le monde et entre les peuples, c'était un peu ironique, mais il passerait outre. Les informations avant tout.

« Pas de problème pour ma lame en fer. Je me débrouillerai si nécessaire. C'est à la fois courageux et rassurant de voir des artisans avec des standards..»

Pouvait-ils avoir plus de chance que cela ? Il ne manquerait plus que le forgeon en soit lui-même un ! (Ahahah.)

- Euh… C'est que j'ai eu très peur, la taille est assez floue dans ma mémoire, mais la gueule arrivait, genre, là ? dit-il en plaçant la tranche de sa main au niveau de son ventre. J'ai pas souvenir d'avoir eu à lever le bras très haut pour me défendre.

Donc, taille poney ou veau, pour ceux assez anciens pour se rappeler de ces animaux. Le forgeron se gratta la barbe, l'expression un peu hantée alors qu'il se replongeait dans ses souvenirs.

- Poilu ? Griffu ? ça grognait, mais ça a couiné quand je lui ai donné un coup de barre sur le crâne. Comme quand on se prend le coin d'un meuble. Alors j'ai recommencé, et j'ai réussi à le chasser d'ici.

Bon, ça l'avait chassé quelque part à l'intérieur de son précieux tabouret, mais ça, il pouvait difficilement l'avouer de but en blanc, alors qu'il en était encore à tâter le terrain. Il secoua la tête, les yeux écarquillés.

- Si j'avais pas été là… avec mes outils en fer...

Il s'appuya d'une fesse sur l'enclume, avec cet air de l'homme réalisant à retardement qu'en d'autres lieux, il aurait fini à la fosse commune.

ft Patron et Aron

A la pêche aux pépites

Le regard de Trizt se fait perçant.

- Vous avez eu de la chance. C'est assez encourageant en effet pour y aller à mains nues ~

Et il faut dire que Trizt n'a pas peur d'y aller salement. N'imaginez pas qu'il ne soit pas capable d'y aller proprement toutefois, si l'envie lui en dit, ou la conscience professionnelle, ou simplement s'il vous aime bien. Il suffit de voir ses amants, ils n'ont généralement rien à en redire. Et pour ceux qui ont à se plaindre, ils ne sont plus en vie pour le faire. Propre et efficace.

- Mais j'imagine que si même vous, vous avez eu l'audace d'utiliser une barre de fer, vous nous ferriez l'honneur de nous en forger une.

Il fait un grand sourire, dévoilant ses crocs, mais le regard sympathique.

- S'il vous plait.

Il a dit s'il vous plait.

Mon vieux pote Iron

Un beau morceau de bête. En tout cas pour celle la, qu'il avait implicitement imaginé quadrupède. Rien ne pouvait lui jurer qu'il n'y en avait pas des bipèdes. Dans le doute, Hénoch demanda :

« Elle était sur quatre pattes, donc ? »

Si cela transformait les humains en gnomes, c'était effectivement simple. Si c'était plutôt type loup, avec tout l'attirail de griffe et de croc, on rigolait moins. Il lui faudrait découvrir si c'est le contact du fer uniquement ou l'assaut lui-même qui avait suffit. D'un point de vue empirique, Creatorem n'avait jamais créé quoique ce soit qu'un bon coup sur le crâne ne pouvait calmer. Certes, tout le monde n'e mourrait pas facilement, n'en déplaise aux humains, mais il y avait quelques constantes.

« Le hasard fait bien les choses, j'imagine. Et si vous avez été contaminé, ce sera assez facile de le savoir. Sans vous le souhaiter, bien entendu. Merci pour ces informations, c'est un bon début.»

Tritz retenta à nouveau. Il était opiniâtre, il fallait l'avouer. Peut-être même qu'il finirait par y arriver, à force d'être aussi emmerdant. Cela fit sourire l'Originel :

« Il a demandé gentiment. C'est rare. » dit-il en ricanant, « Il va continuer de demander jusqu'à sa mort ou la votre. »

- Pas besoin de payer pour ça, suffit d'aller piquer un tisonnier dans les ruines de l'Eden…

Avant que les charognards commencent à se rabattre sur ce genre de merdouilles, ses deux clients avaient tout loisir de trouver leur bonheur sans monopoliser ses forges pour quelque chose d'aussi trivial.

Son regard glissa alors sur un gros détail dôté d'une queue de cheval et d'oreilles plaquées dans ses cheveux. Sagace. Il lui avait pourtant dit de ne pas revenir !

- Les petites billes seront prêtes dans deux heures. Les grosses, faudra revenir demain. Si y'a besoin de tordre deux tisonniers ensemble pour en faire un plus gros, ça prendra vingt minutes, le temps de chauffer le fer, tenta-t-il d'expédier ses deux clients, soucieux de renvoyer son manticore ailleurs, là où il serait en sécurité.

ft Patron et Aron

A la pêche aux pépites

Trizt lâche un lent soupir à fendre le coeur. Son regard intense fixe le forgeron comme si c'était un cookie vampirique.

- Quel dommaaaaaaage ~

Il donne une petite tape fraternelle sur l'épaule de son chef et fait demi-tour pour l'inciter à partir avec lui, admirant l'homme qui vient d'arriver dans le périmètre. Il tourne la tête vers le forgeron.

- A demain, sans faute.

Lacrimosa

A la pêche aux pépites ft Hénoch - Aron